Décembre 2025
On y croit.
Fake song
Le Père Noël, la p'tit'souris,
l'école publique égalitaire,
le bon diplôme, aucun mépris,
un vrai boulot, un plan de carrière,
Rien de tout ça n'est vrai, je sais.
La vertu en économie,
l'écologie des militaires,
notre planète qui revit,
les colonies interstellaires.
C'est du bidon, je sais, je sais.
Une passion sans préavis,
le septième ciel, et sans manières,
le grand amour toute la vie,
la magie de l'imaginaire.
Un rêve bleu, je sais bien, mais...
Si pour une fois on y croyait ?
Novembre 2025
Premiers jours de la Saison Sombre.
Holocauste holocène
Que sont-ils devenus?
Ceux que nous avons dévorés dépecés déplacés,
ceux que nous avons pêchés piégés traqués
jusqu'au dernier.
Etaient-ils trop étranges, le grand renard volant,
le poisson à main lisse, le rat lièvre à pieds blancs,
la chèvre des cavernes ou bien l'éléphant nain?
Etaient-ils trop voyants, la grenouille arlequin,
et l'hippotrague bleu ou la truite argentée,
la roussette rouge et la taupe dorée?
Endormi à jamais, le célèbre dodo.
Porté disparu, le requin perdu.
Le glas sonne au printemps du vanneau hirondelle.
Un dernier grand saut, l'oryx algazelle.
C'est la fin du voyage, le pigeon migrateur.
Six pieds sous terre, le boa fouisseur.
Que sont-ils devenus?
Ossements de musées, archives de légendes,
daguerréotypes, aquarelles cendres,
ils nous attendent.
Octobre 2025
Trajets, travail, tracas.
En ligne
Tramway même automate
t'es trop lourd quand tu roules.
Emmène moi donc à ma Dame
rail après rail vas-y cavale
station passion direction amour.
Septembre 2025
Premières fraîcheurs. Les araignées regagnent nos intérieurs.
Celle qui n'aime pas les araignées
Il n'est pas aisé de vivre
avec une arachnophobe.
Car j'ai beau convoquer les plus grands poètes,
il me faut chasser la plus mesquine aragne.
Je ne te tuerai point, malheureuse bête,
il n'est pas de haine au coeur de ma compagne.
Mais...
Hors de sa vue ! Tu lui fais peur.
N'en parlons plus, et file ailleurs.
Je connais ta plaidoirie,
tu la pleures sous les chaumes.
En vérité, tu ne fais de mal qu'aux mouches.
Ta prétendue laideur ? C'est dans ta nature.
Tu croques mites et blattes, à pleine bouche.
Et tu as du génie pour l'architecture.
Eh !
La star des toiles, la miss la soie,
reste secrète, c'est mieux pour toi.
On prétend qu'à l'origine
se cache une peur de môme.
Sa peau épicée garde la trace pâle
de fièvres enfantines, une cicatrice
de monstre à huit pattes, à venin tropical.
Tu tombes mal, pauvre épeire sans malice.
Paix ?
Toutes les deux êtes amour.
Pour toi la nuit. Pour elle, le jour.
Août 2025. Une année s'achève, une autre s'annonce.
Je parle d'années scolaires, on ne se refait pas.
Quatre saisons, quatre haïkus.
Courts d'écoles
La rentrée. Les feuilles
des cahiers sentent le neuf,
celles d'arbres, la pluie.
Privés de récrés
deux ou trois pantins de neige
fondent sans enfants.
Sortie en forêt :
botanique, zoologie -
amitiés d'avril.
Rires au soleil,
sorbets, jeux de société,
famille en vacances.
Juillet 2025. Un pantoum écrit en 2023, mais toujours d'actualité.
Et pour longtemps encore ?
Nos nuits arides
Coup de chaleur on perd les eaux
même la nuit on fuit l’amour
on est brûlants dedans nos os
ce sera pire au point du jour.
Même la nuit on fuit l’amour
le ventilo encalminé
ce sera pire au point du jour
combien de temps vas-tu m’aimer.
Le ventilo encalminé
pas de répit et pas de fuite
combien de temps vas-tu m’aimer
mains malhabiles, langues recuites.
Pas de répit et pas de fuite
plus de fontaine, plus de sourcier
mains malhabiles, langues recuites
y a plus d’amour c’est pas sorcier.
Plus de fontaine, plus de sourcier
quand tout est sec même le coeur
y a plus d’amour c’est pas sorcier
j’ai pas de larmes, pourtant je pleure.
Quand tout est sec, même le coeur
fini l’histoire, c’est du mélo
j’ai pas de larmes, pourtant je pleure
coup de chaleur on perd les eaux.
Juin 2025. L'été, un peu plus.
En attendant d'être aimé.
Ténéré
Sable reptile
rocs affûtés
fossiles en devenir.
Sémaphore patient
battu de dunes,
il appelle tes yeux
mon cœur ammonite.
Mai 2025. Souvenir des luttes, espoirs de paix.
Un poème écrit en 2024, encore inédit.
Grand Lac
La rive s’ombre et bruisse dans ses joncs.
Pirogue hissée, feu avivé,
de l’enfant que j’étais surgit ma chanson
Michigan est miel, la guerre a cessé.
Des flammèches nourries d’un peu d’herbes grises
la fumée, odorante, grimpe droite.
Ma pensée la suit dans le soir humide
puis s’égare elle aussi en volutes.
Face au Grand Lac je rêve avec mes morts.
Au combat tout est passé.
Sur l’eau de bronze que la lune irise
se dévoile intouché
le plein récit d’un avenir.
Avril 2025. Le Printemps des Poètes.
Tout naturellement, un poème sur le thème de l'année 2025 : Volcanique.
Cœur de lave
À volcan jeune, mauvaise terre.
L'eau rare, le silence de désert,
l'altitude, la froidure d'aurore :
mon thorax cherchait l'air.
Sous mes yeux embués, brique et rouille,
trois livres de lave en forme de cœur.
Pourquoi me surcharger d'une lourde scorie ?
Le cœur n'a pas de raison.
Insensible aux années, ce cœur fidèle
serre mes livres de poésies
rebelles à une vie rangée.
Parfois, il fait la presse sur mes textes,
un peu trop portés au courant d'air.
Je les aimerais plus denses, volcaniques,
avec panache et projections stratosphériques.
Mais une fois sur cent une étincelle,
sinon ratures, remords, brouillons, boulettes,
souvent un avant-goût de cendres.
Si, las de l'observer, de méditer,
je le saisis, rêches caresses,
est-ce lui qui se leste ou mon poing qui s'incline ?
Le voici qui me verse un coup de nostalgie.
Gouttelette séchée d'un basalte titan,
ce cœur de lave, cruel esclave,
n'oublie jamais de me prévenir :
un jour, il changera de mains.